"Hommes/femmes politiques, journalistes au petit pied, philosophes du dimanche ou stars à la ramasse: tous sèment des perles de bêtise, sans se douter que, dans l'ombre, l'autruche les note, les commente, s'en gausse, et recrache le tout sur ce blog."

Mai 2014

L’ultime leçon de Feu le sous-commandant Marcos

Tirant tête hors du trou, qu’entends-je ? Le tam-tam  médiatique s’emballant, frénétique, frôlant l’apoplexie sonore. Sonnez tocsins, résonnez amusettes en forme d’anathèmes et d’indignations feintes. C’est que l’électeur français, cet âne trop bien bâté, ce fifrelin grossier a, une fois encore, choisi de jouer sa partition, prêtant moins qu’une sourde oreille aux cris d’orfraie d’une presse écrite et radio et télévisée n’ayant eu de cesse, ces derniers temps, d’activer moult gyrophares, faisant péter comme jamais les grandes orgues d’un antifascisme bon teint ayant pourtant prouvé, de long temps, sa pleine innocuité dès lors qu’il s’agissait de combattre le Front National. Ce qui devait advenir, advint : à trop lui répéter  que voter FN, c’est mal, c’est moche c’est vilain, la curetaille médiatique a fini par offrir, comme sur un plateau de purin, le statut de rebelle, d’outlaw, à l’électeur FN. Et le même clergé de s’étonner, le lendemain, que le parti de la haine et de la rancœur se hisse à un niveau jamais atteint et devienne, mais oui, le premier parti de France.
     On rétorquera, à juste titre, qu’il serait pour le moins oiseux de ne tenir pour responsable de cette bérézina que les seuls medias. Le personnel politique, en domesticité docile de la finance et du patronat aura, bien entendu, plus tard, des comptes à rendre en ce qui concerne la montée des nationalismes en Europe, ascension que leurs programmes austères, liés à l’extrême frivolité de leur non-pensée politique – que résume assez bien la formule « après moi le déluge » - n’aura fait que nourrir, de loin en loin. Maudits soient ces frileux, ces piteuses poules mouillées de la sueur produite par leur trouille congénitale, ces munichois, ces trembloteurs ! Qu’ils aillent au diable, mais : qu’ils soient alors suivis de près par le troupeau d’éditorial-tristes, de pisseurs de papiers crasseux sur « l’invasion Rroms » et autres chieurs de reportages magnifiant la police, laquelle mènerait, en banlieue, « une véritable guerre ».
      25 %. Une paille. Une poutre dans l’œil de Hollande qui, brillant analyste, déclarait sur France2 : « ce vote, il est là, et doit être regardé en face. Ce serait une faute de fermer les yeux, et je ne la commettrais pas. » Ne doutant pas un seul instant de sa capacité à se rendormir illico et à nous conduire droit dans un mur dont il semble être le seul à ignorer que nous l’avons déjà percuté, il ne nous reste qu’à souhaiter à Hollande et aux soldats roses bonne nuit, les petits, étant bien entendu qu’il ne sert plus à rien de leur botter le cul, cette partie de leur anatomie étant, au même titre que leur cerveau, totalement anesthésiée.
      Certes, une certaine gauche de droite l’a emporté en Espagne, et au Portugal. Certes la gauche radicale avec Syriza est arrivée première en Grèce, réalisant un score près de trois fois supérieur à celui des nazis d’Aube dorée. Cela ne suffira à consoler que ceux qui, au moment d’être fusillés, demandent à ce qu’on leur bande les yeux. Car en France, en bas, là, les franchouillards triomphent, campés dans leur rancitude et racisme assumés, sûrs de leur bon droit comme de la qualité de leur camembert made in France. Il faudrait les comprendre, les écouter ? Et pourquoi pas leur pardonner ? Rien, pas une excuse, pas un alibi, pas une once de mansuétude pour ces ploucs enformolés dans leur travail, famille, patrie ! Il n’est plus temps de tergiverser (« vote protestataire », la bonne blague!), il convient désormais de les renvoyer dans les cordes et de les knock-outer, non sans avoir pris soin de leur cracher à la gueule. Le Front National, aujourd’hui, c’est 14 communes, 1500 élus locaux, 24 députés européens, plus de 4,7 millions d’électeurs, au moins autant de sympathisants : une paille ? Un feu, plutôt !
     Le Front National c’est aussi une bande d’azimutés de première, dont Robert Ménard, maire bleu marine de Béziers, n’est pas le moins… perturbé. J’en veux pour preuve que maire Ménard vient de publier un décret municipal interdisant l’étendage du linge aux fenêtres, jugé par lui « inesthétique ». Au programme du prochain conseil municipal: la couleurs des boutons de chemises, et de nouveaux feux tricolores jouant sur le bleu, blanc, rouge, le vert et l’orange étant jugé par Ménard comme pas beaux.
     Pour finir, et comme une sale nouvelle n’arrive jamais seule, saluons ici la mémoire du sous-commandant Marcos, lequel a disparu. Non pas qu’il soit mort des suites d’une longue maladie comme se plaisait à l’imaginer et à en répandre la rumeur les ennemis de l’EZLN, mais, après des années de lutte, réapparaissant à l’occasion de l’enterrement du compagnon Galeano,  entouré des autres sous-commandants zapatistes il a simplement signifié « Marcos cesse d’exister aujourd’hui ». La raison de ce retrait définitif est claire, à la lecture de cet extrait du communiqué collectif : « nous nous sommes rendu compte qu’il y avait une génération qui pouvait nous voir de face […] Marcos, le personnage, n’était donc plus nécessaire. C’est notre conviction et notre pratique que pour se dévoiler et lutter les leaders ou chefs ne sont pas nécessaires, ni messies ni sauveurs, pour lutter il faut juste un peu de honte, un soupçon de dignité et beaucoup d’organisation. Le reste, soit il sert au collectif, soit il ne sert pas. » Une fois encore les leçons les plus essentielles descendent des hautes montagnes du Chiapas, et parviennent jusqu’à nous. Sommes-nous disposés à les entendre ? Pas si sûr.  
                                                                                            Frédo Ladrisse.


La fièvre de la sentinelle.

Tirant tête hors du trou, qu’entends-je ? Prêtant l’oreille aux cris d’orfraie d’une presse papier en manque de lecteurs, il semblerait que la panique gagne les rédactions : Kiev, Sarajevo, même combat, l’occasion est trop belle, en cette année de centenaire, de dresser le parallèle et d’ameuter les foules en laissant les prédicateurs à la petite semaine nous annoncer, pour la Noël, la troisième guerre mondiale. Mais si les ingrédients d’un scénario de type conflit planétaire semblent, en bonne partie, réunis, il manque le sel essentiel sans lequel cette soupe restera imbuvable : le désir, chez les peuples, d’en découdre. De se faire déchiqueter pour l’honneur.
     Certes, partout ou presque en Europe la fièvre nationaliste empourpre fronts et joues. Cette engeance est d’autant plus dangereuse qu’en face peu de forces paraissent en mesure de s’y opposer. Pour autant les mentalités depuis cent ans ont évolué, et les baïonnettes endormies dans leurs fourreaux sanglants risquent peu de rejoindre d’aussitôt les canons. En Ukraine comme ailleurs, mêmes les hallucinés rêvant de sang impur abreuvant je ne sais quels sillons ne semblent plus guère disposés à ce que le leur soit versé au nom de la patrie. En un sens, c’est plutôt bon signe. Il n’en demeure pas moins exact que les élections européennes sont assurées de voir le sacre des partis nationalistes fascistes racistes pétris de haine et de rancœurs patriotardes. Les mêmes chants abscons résonneront, de la Norvège à la Grèce, en passant bien sûr par la France, rance patrie des droits de l’homme blanc, où règne désormais une islamophobie d’Etat mêlée de racisme assumé, à tout le moins « décomplexé ». Il faut se rendre à l’évidence : nous vivons désormais dans un pays où une ministre, pour peu qu’elle soit noire et n’entonne pas la Marseillaise du haut de la tribune, se voit conspuée, accusée de traitrise, sommée de démissionner par toute la frange patriotarde d’un personnel politique biberonnant du bleu-blanc-rouge laquelle, loin de se limiter à la droite, embrasse un large spectre courant de Le Pen à Mélenchon. Nous vivons dans un pays où, quand quelques dizaines de lycéens mieux informés que d’autres de l’affligeant sexisme, véritable pilier de notre société,  sous prétexte d’avoir décidé de porter, une journée, une jupe malgré leurs mâles attributs, se voient hués, chahutés, et malmenés par les foutraques de la Manif pour Tous, appelés à Nantes les sentinelles. Un geste simple, et pacifique, de défense de l’égalité entre filles et garçons peut ainsi, dans ce pays, vous vouer aux gémonies. C’est assez dire le nom que portera, ces prochaines années, l’ennemi à abattre. 


                                                                                               Frédo Ladrisse.


1er Mai : muguet sauce au gaz

Tirant tête hors du trou et revenant de la traditionnelle manif’ libertaire du 1er mai, manif’ bon enfant d’habitude, permettant de sortir les mômes et de retrouver de vieux copains pas vus depuis des mois, de chanter gueuler avec eux, bringzinguant sans encombre de Belleville à Bastille. Cette année, l’ambiance fut tout autre. Au piteux prétexte d’une vitre de Monoprix brisée (la rumeur courant son train il fut de suite question d’un magasin « dévalisé » : je suis passé devant : les rayons allaient bien, merci) une armée de gendarmes mobiles et pas fairplay : mobiles, ont joué la présence de masse, le gazage à outrance et le matraquage à l’aveugle. Quelle bande de trous du cul, pensais-je à part moi, livrant à qui voulait l’entendre mon analyse de l’évènement : en France, dès qu’un ancien ministre de l’intérieur devient prems’ ou pire, président, les bouledogues se lâchent et se croient tout permis. Valls, Sarko, même combat : primauté de la force sur le droit (une des définitions du fascisme). 
     On me murmure dans l’oreillette que la véritable raison de l’agacement policier agrémenté de bombes au poivre serait le passage à tabac d’un membre de la BAC, de cette néo-naze Brigade Anti Civils écumant à l’accoutumée, et nocturnement, les quartiers. Ce n’est pour l’heure qu’une autre de ces rumeurs de fin de manif’. Cependant, si celle-ci devait se révéler exacte, au moins éprouverai-je la satisfaction de ne m’être pas fait gazé pour rien.
     Laissons-là ces péripéties à la petite semaine et revenons à l’essentiel, à notre commune religion notre très-sainte mère à tous : l’économie. Quand il n’est pas à Rome en train de baiser les Très Saintes Chausses de François 1er, Valls concocte sur un post-It un « plan d’économies » dont l’équation est simplissime : où trouver 50 milliards ? La réponse s’abat telle une lame sur nos cous, nous les trouverons, dit-il, dans la poche des petits vieux (retraites), dans celles des fonctionnaires (gel des salaires depuis quatre ans et pour trois années de plus), dans celle des malades (Sécu). « Ce plan est calibré, bien réparti, et juste », estime le premier sinistre. Calibré, kézako ? Bien réparti entre les pauvres, cela à coups-sûrs. Juste ? Pfff…. La xyloglossie (langue de bois), même elle, connait ses limites. Une question rarement voir jamais abordée par les pisseurs de copies et autres journaleux aux ordres est : 50 milliards, pour quoi faire ? S’il n’était pas totalement dépourvu de sincérité, les malfaisants serrant les cordons de toutes les bourses hors les leurs seraient alors contraints de répondre qu’après avoir promis un cadeau de 35 milliards au patronat français, c’est sous nos pauvres matelas qu’ils espèrent bien les dénicher. Voleurs, bandits, brigands, crapules, en un mot : socialistes !
     Pensiez-vous que les maîtres des forges, l’association des exploiteurs ayant pour nom Medef se contenterait de ce cadeau-ci ? Ils l’ont applaudi, clap clap clap, fait péter la thune, Valls ! Le lendemain, ils se sont remis au travail, à cette lugubre tâche consistant à trouver de nouveaux moyens d’augmenter les profits de leurs confrérie au détriment de celui de la masse miséreuse qui, sous régime libéral, n’a qu’à bien se tenir et fermer sa grande gueule sinon c’est la porte le chômage la rue le suicide, et basta. Comme ce ne sont pas des génies, comme ils ne sont pas même ingénieux mais, au mieux, ingénieurs, ils eurent l’idée de recycler une antédiluvienne idée : le « Smic jeune », sous-salaire pour maxi-profits, appelé CIP sous Balladur (la rue l’a dégagé direct), puis CPE sous Dominique Galouzeau de Villepin (même destin). « En France, le salaire minimum est trop élevé », osa Pierre Gattaz, président du Medef. Une phrase à mettre selon moi en regard de celle, répétée à l’envi par Sarko président, affirmant que « lorsqu’on perd son travail, on perd toute dignité ». Dès lors, l’évidence s’impose : rompons une fois pour toutes avec cette idée « ringarde » de salaire, et redonnons leur dignité à ces millions de chômeurs, grâce au travail gratuit. Une idée simple, qui coule sous le sens, et promise à un bel avenir. A condition, bien entendu, que ce travail gratuit soit également obligatoire, car autrement le chômeur, connu pour sa fainéantise et son manque de patriotisme, risquerait de refuser tout retour vers la « dignité ».
     Bon, ça n’a pas marché. En pleine période de cadeaux tous azimuts aux entreprises (ou plutôt aux chefs d’entreprises), cette demande d’autorisation d’exploitation à peine masquée d’une jeunesse en plein désarroi passa pour, disons, une faute de goût. Erreur de timing, sans doute… Pas grave, on attendra, dit le Medef en chœur. En attendant, Gattaz, qui décidemment ferait passer cette raclure de Parisot pour une gauchiste de base, enchaîna sur une demande de « modération salariale » : traduite en langage commun, l’expression signifie le gel des salaires, de tous les salaires, et ceci durant des années. « C’est la condition sine qua non pour que le pacte de responsabilité ait des effets bénéfiques », menace Gattaz. Nouvelle traduction : merci pour les 35 milliards, bon ok on s’est engagé à créer des emplois mais finalement non, on le fera que si on peut encore moins payer la plèbe. Autrement ? Allez vous faire foutre, et merci pour le chèque. 
     30 ans que ça dure, que le « monde de l’entreprise » nous chie dans la bouche sans jamais provoquer la moindre réaction d’un pouvoir politique aux ordres du porte-monnaie mondial. Le « travail coûte trop cher » (alors qu’en réalité il n’a jamais tant rapporté), ce sont les entreprises (les « chefs d’entreprise ») qui créent l’emploi et donc, c’est eux qu’il faut aider, soutenir, au détriment des salariés… Calembredaines, billevesées…  Depuis l’ère mitterrandienne jamais aucun plan destiné à engraisser le patronat via la baisse des charges, les exonérations d’impôts, les chèques de 35 milliards, n’ont fait reculer le chômage en France. Jeu de dupes, foutaises. Car en réalité le patronat n’a aucun intérêt à lutter contre le chômage : c’est son meilleur allié. En permettant de maintenir une « modération salariale » laquelle, n’en déplaise au Medef, est devenu la règle depuis deux décennies, en permettant de maintenir la pression sur des salariés lesquels préfèrent gagner peu que ne rien gagner du tout ; en jouant constamment sur les menaces de fermeture, de dépôt de bilan, de délocalisations comme d’armes de destruction massives d’un bassin local, d’une ville, le chômage et le prétendu «coût du travail» nourrissent un chantage permanent auquel le personnel politique, de gauche comme de droite, cède moins par lâcheté que par goût pour le dogme libéral.
     Autre rengaine entendue cent fois, et qui en ce moment entame un retour comme en douce : non content d’être trop payé, le salarié français ne travaillerait pas assez. D’où la nécessité, pour quelque chose comme « maintenir notre compétitivité » (autre tarte à la crème que cette « compétitivité »), de revenir aux 39 heures naturellement payées 35. Le patronat, qui a assez mouillé la chemise, comme on a vu, sur d’autres sujets, laisse cette fois la droite labourer le terrain. Ainsi a-t-on pu entendre Eric Woerth, de sinistre mémoire, affirmer que « cette fois, je crois que les Français sont prêts. » Après s’être fait travaillé par de la mauvaise vaseline durant de longue années, nous serions aptes à tendre le cul ? L’énormité de la chose est que Woerth au nom de rot n’a peut-être pas tout à fait tort.
     Partage des richesses : les 67 personnes les plus riches du monde possèdent à elles seules autant que la moitié de l’humanité. Voilà des gens « compétitifs ». Adn : la totalité de la gente masculine d’un lycée de La Rochelle a vu son Adn prélevé, dans le cadre d’une enquête pour viol. Un seul des élèves a refusé « une forte tête » selon le proviseur, « un anarchiste. » Bien entendu le voici dans le collimateur de la police qu’on dit scientifique, malgré l’oxymoron. Dernière bonne nouvelle, pour la route : Finkielkraut le patriotard, l’islamophobe notoire ultraconservateur fanatique de la Marseillaise, entre à l’académie française. Soral et Dieudonné n’étaient pas disponibles ?
 
                                                                                                 Frédo Ladrisse.

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