"Hommes/femmes politiques, journalistes au petit pied, philosophes du dimanche ou stars à la ramasse: tous sèment des perles de bêtise, sans se douter que, dans l'ombre, l'autruche les note, les commente, s'en gausse, et recrache le tout sur ce blog."

Août 2010

Matins bruns

Tirant tête hors du trou, qu’entends-je ? Mercredi 25 août, les cadors du Sarkoland opéraient leur rentrée sur le perron de l’Elysée, bronzés, blasés, blindés, les fesses serrées néanmoins puisqu’approche  la valse à mille temps d’un remaniement de saison. A ses redevables ministres, Sarko demanda ce jour-là du « courage » et du « calme », ainsi que « du travail et de la détermination. » En manquaient-ils, ces derniers temps ? A notre grand regret on ne peut qu’en douter, vu comment s’ébrouèrent ces clebs en cet horripilant été. Chien d’entre les chiens, chef de meute, le ministre de l’intérieur n’a pas, un jour, lâché son os : si le poil est terne et l’œil torve, le clébard exerça cependant ses mâchoires sur quelques mollets, bien choisis : oui, les « évacuations » (euphémisme de l’Intérieur) de campements roms vont se poursuivre, vont même s’accentuer, étant bien entendu que « l’aspiration des Français est simple : on n’occupe pas un terrain, un immeuble, une maison de manière illicite. » D’aucuns pensaient, piteux naïfs, que les Français aspiraient surtout à des revenus décents, à un mieux-vivre, à, rêvons un brin, un peu de plaisir et de joie. Que nenni, mon colon : le Français tel qu’en rêve Hortefeux-follet n’est jamais qu’un SuperDupont testostéroné à outrance privilégiant, à l’exclusion de toute autre considération, le Culte de la Propriété. 
 
     Ce Français-là, au lait cru non pasteurisé, avale sans broncher l’annonce des 138%  de « hausse de la délinquance roumaine sur Paris l’année dernière » et autre chiffres débilitants dont nous gavent le Brice. 138 % de quoi ? 138 %, sur quelles bases? 138 % de rien. Par ailleurs, une fois qu’on aura re-re-re-répété que Rom n’est pas synonyme de Roumain, en cette période de rentrée scolaire on se permettra de soumettre ce petit exercice au ministre Hortefeux-nouille, qui semble affectionner les chiffres : 8030 Roms expulsés depuis le premier janvier, sur un total de 15 000 présents dans le pays. Combien en reste-t-il à rafler? 8030 Roms expulsés, pour 30 000 expulsions, toutes populations confondues: vous calculerez la part occupée par les Roms dans les chiffres du ministère.
 
      Des chiffres, encore, en voulez-vous ? En revoilà, cités par Eric Besson qui, lors de sa rencontre avec des ministres roumains, n’a, de leur part, « pas entendu le nombre du quart d’un demi-grief. » Le quart du nombre de quoi déjà? Vite, garçon, un demi ! Chiffres un jour, chiffonné toujours, comme chiffonne ce sondage qui dit que 42 % de nos compatriotes seraient contre les expulsions. Il parait que c’est une bonne nouvelle. C’est, pour ma part, à en pleurer, ou à en choper la rage (vous pouvez cocher les deux cases).
 
     D’où viendra la bonne nouvelle ? Assurément pas de la gauche dite de gouvernement, qui observe, au sujet des Roms, un tintamarresque silence, et qui par la voix de Ségo-la-folle-du-Sergent regrette « qu’on ferme les régiments, (sic !), plutôt que de repenser ces lieux d’éducation et d’encadrement des jeunes. » Caserne pour les gosses et treillis pour tout le monde ? Bayrou est classe aussi, dans son genre bien particulier : le béarniais juge ainsi que « les premières victimes de cette stigmatisation des Roms sont les gens du voyage, Français depuis des générations. » Puis de bégayer tout béat que « beaucoup de gens biens vont payer la casse. » Gens biens ? Gens Français, quoi… Finalement, n’étaient les drames humains que cette situation engendre, il serait assez poilant de voir ainsi la trouble fleur de l’élite politique, toutes échoppes confondues, embrasser les mêmes poncifs mille et une fois recuits. D’où vient, dès lors, qu’on ne rit pas ? N’est-ce pas que les brumes actuelles annoncent de prochains matins bruns ?
 
                                                                                             Frédo Ladrisse   


Tant qu’il y aura des Roms

  Tirant tête hors du sable de la plage, qu’entends-je ? Depuis le discours de Grenoble, acte de bra voure sarkozyen et confirmation du virage néolepénopétainiste du petit Nicolas, depuis, donc, ce cantique éructomaniaque pointant d’un doigt gras, dans le désordre, mais dans un désordre réfléchi, un désordre pensé au cynisme par trop calculé, les Arabes, les Délinquants, les Gens du Voyage et les Roms, depuis le trop fameux enfumage du 30 juillet, ne cesse de défiler devant nos yeux effarés la crasse litanie des expulsions de campements et rafles afférentes. En un mot comme en cent, on en est sur le cul. Une chose est de sentir la menace qui gronde, une autre est de la voir, soudainement, se réaliser. Cochonceté que cet été qui, au prétexte d’envoyer le bon peuple en congés payés, autorise maires et préfets à se comporter comme autant d’oberstumfürhers locaux, petits Papons de pacotille et autre Déat d’opérette. Ils obéissent aux ordres, ça oui. Séparent les femmes des hommes comme aux plus beaux jours de l’été 1944, prenant soin de liguer, à grand renfort de presse, le Français de base et pur porc contre tout ceux qui s’entêteraient à ne pas trop lui ressembler, ou refuseraient d’embrasser sa philo-beaufitude. Au demeurant, on ne s’étonne guère d’entendre Hortefeux-à-volonté se vanter d’avoir « démantelé quarante camps en quinze jours » (encore cette déclaration datait-elle du treize août dernier, à combien en sommes-nous maintenant, amer comptable de l’horreur ?), ni de le voir se gargariser d’un sondage positif donnant, dans Le Figaro, 80 % d’opinions favorables à la politique raciale initiée par l’azimuté de l’Elysée : « le sarkozys me n’est pas en phase avec les élites, mais avec la société », pérorait Hortefeux-follet. Remplacez « société » par « peuple », et voilà une déclaration qu’Il Duce, en son temps, n’aurait certainement pas reniée. De ce sondage, Xavier Bertrand estimait lui que c’était « une claque pour les bien-pensants. » En tant que représentant dûment estampillé de la mal-pensée régnante, il ne pouvait que s’en féliciter. Guère étonnant non plus de voir Eric Besson, en retraite forcée depuis que s’est achevé en capilotade homérique son affligeant débat sur l’identité, prendre, à l’instar de ses copains, ce nouveau virage à droite toute, et affirmer sans rire que « la France est le pays le plus respectueux en matière de droit des étrangers. » Et d’ajouter qu’elle n’a donc « aucune leçon à recevoir. » Il s’agissait là d’une réponse aux critiques formulées à l’égard de la France par le CERD (Comité pour l’élimination de la discrimination raciale, émanation de l’ONU), lequel, pour une fois, ne prenait pas de gants et relevait,  mi-août, que « la France est confrontée à une recrudescence notable du racisme et de la xénophobie.  » On imagine sans peine la réaction de l’hôte du Cap-Nègre à cette déclaration, on le voit d’ici le Sarko, rien à tamponner de l’ONU, je lui pisse à la raie moi, je suis le maître (et) après Dieu. D’autres petits sergents aux ordres se sont également chargé de faire un sort au CERD, tel Dominique Paillé, porte-parole de l’Ump, pour qui ce comité n’est jamais formé que « de gens qui sont à cent lieues des réalités. » Ce qui n’est pas tout à fait faux, si l’on veut bien considérer qu’entre les informations auxquelles a accès ledit comité et ladite réalité, autrement plus terrible, le décalage doit être pour le moins impressionnant. Peu importe, d’ailleurs, car selon Claude Guéant, secrétaire général de l’Elysée, les critiques du CERD seraient « un montage pur et simple. » Allez en paix, la messe est dite… Dans toutes ces réactions caporalesques et à gerber émanant de la sarkozerie, il n’y a pas de quoi surprendre une autruche qui, depuis des années, pointe avec d’autres la dérive extrême-droitière de notre Bananée République. Plus curieux lui semble par contre ce qu’elle relève dans les medias, une nouvelle tonalité, ou plutôt l’exagération d’une tonalité ancienne, dans le registre La voix de son Maître. Les médias sont aux ordres, c’est une chose entendue, aussi sûr que Kim-Il-Val dirige toujours France Inter. Mais la nouveauté de cet été est qu’ils devancent maintenant l’appel, n’hésitent plus à anticiper les présidentielles pulsions ultrasécuritaires, autrement dit en font des tonnes, de Grenoble aux expulsions de Roms. Florilège, de caniveau : on a ainsi pu lire, concernant les émeutes dans le quartier de La Villeneuve, le portrait de ces « policiers qui, chaque nuit, montent au front » sic !, comme si la préfecture de l’Isère pouvait être comparée aux faubourgs de Kaboul. On a pu entendre, sur les Roms, quelques expressions aptes à faire se dresser les cheveux sur la tête d’un chauve, telles que « la croisade contre les Roms », ou encore, au sujet de leur expulsion, « retour en Tziganie », chef d’œuvre de non sens absolu puisque ce peuple, justement, se définit comme sans patrie ni territoire particulier. Il fut également précisé et répété à l’envi que, à l’occasion de ces « retours », « l’Etat offre le billet d’avion ». Belle générosité ! A propos, cette fois, des gens du voyage, après qu’on nous eut martelé qu’ils étaient, eux, Français madame, un avocat de ceux de Bordeaux venait marteler sur M6 qu’ils étaient non seulement « Français, mais aussi commerçants. » Ce qui, évidemment, ne peut que forcer le respect. Mais la lèche d’or revient sans nul doute à la présentatrice du journal de M6 toujours, la nommée Aïda Touihri, laquelle semblait déplorer que les familles de Bordeaux aient refusé les deux terrains mis à disposition par le maire, « alors même que Alain Juppé avait écourté ses vacances pour les leurs proposer. » Décidemment ces gens (du voyage) ne respectent rien.
 
      De respect il en sera également question, de dignité aussi, sans parler du manque de courage, lorsque François Fillon passera en procès pour avoir, au cœur de l’été 2010 et à la surprise générale, décidé de laisser perdurer l’hécatombe des usagers de drogues, décidé de laisser se développer en silence la redoutable épidémie d’hépatite B et C (laquelle et pour information, est loin de concerner les seuls toxicomanes), décidé de traiter comme par-dessus la jambe un grave problème de santé publique, dans l’unique objectif de coller à l’air du temps et aux consignes de son Seigneur, bref de faire une fois de plus plaisir à l’aile la plus droitière et la plus rétrograde de son électorat. Ainsi, les salles de consommation de drogues seraient selon lui « ni utiles, ni souhaitables » ? En dépit du bon sens, et contre l’avis d’une grande partie des populations concernées (toxicomanes, professionnels, associations, élus, et jusqu’au ministre de la santé …), Fillon joue l’idéologie contre la rationalité, et fait le choix de mettre en péril quelques centaines de milliers de vies plutôt que de risquer d’être accusé de « donner de la drogue aux drogués », comme disent les excités et les fieffés menteurs opposés à ces salles, au premier rang desquels on retrouve… le député Vanneste. Toujours dans les bon coups, cette vieille connaissance et homophobe notoire, publie sur son blog un appel (signé par quinze de ses collègues) où il tient à rappeler que « l’usage de drogue est toujours illicite dans notre pays » (merci pour l’info), et « qu’au lieu de céder aux groupes de pression qui en demanderont toujours davantage » (certainement Vanneste fait-il là allusion au « groupe de pression » Act-Up, ces ennemis de toujours), il conviendrait de « mettre en place une véritable politique de sevrage. » Forcé, le sevrage ? Cela va de soi. Mais c’est à Fillon en premier que revient la responsabilité d’avoir cédé, droit dans ses bottes, aux sirènes de ces populistes, d’avoir donné priorité aux résultats électoraux plutôt qu’à l’injonction d’agir contre une épidémie qui concernera bientôt près de huit cent mille personnes. Rendez-vous au procès Fillon, d’ici quelques années. Et si il n’est pas entretemps décédé d’une bête hépatite, on aimerait beaucoup y voir comparaître Vanneste.
 
     Puisqu’on parle de procès, faisons donc un tour par chez les Woerth. Certes, le toujours ministre du travail n’est pas encore condamné à traîner derrière lui chaînes et boulets (quoi que…), cependant le ciel de ce mois d’août n’a cessé de s’assombrir au-dessus du crâne guère chevelu du récidiviste notoire. On a par exemple découvert que le garçon avait la manie de distribuer les breloques et autres médailles en toc à tout ceux qui ont la bonne idée de lui rendre service, tel ce Bernard Godet, obscur expert-comptable, mais légion d’honneur 2008. De quelle gloire se couvrit Godet pour mériter telle récompense ? C’est tout simplement lui qui a certifié, la même année, les comptes du parti de poche de Woerth, comiquement intitulé Association de Soutien à l’Action d’Eric Woerth. Godet, toute honte bue (ah ah ah), avait également visé les comptes de campagne du même Woerth, lors des élections municipales de Chantilly. Mélange des genres, dites-vous ? Allons… Ceci n’est certainement que pure coïncidence. Coïncidence toujours, quand plus tard on apprend que le ministre a donné, en mars, son aval au licenciement des représentants du personnel de l’usine Molex, ceci contre l’avis de l’inspection du travail, mais sur l’amical conseil d’un proche collaborateur nommé de Sérigny, lequel Sérigny travaillait également pour le cabinet d’avocats de la direction de… Molex. Vous suivez ? C’est pas terminé. Il se trouve que ce Sérigny, lequel doit avoir plusieurs têtes pour porter tant de casquettes, est également l’ami de sieur Patrice de Maistre, lequel gère comme on sait la fortune de la môme Bettencourt. Que ce monde (de riches) est petit… Surtout, le même Sérigny se trouve être membre du comité de surveillance d’une boîte nommée Yméris, comité dans lequel siège également Robert Peugeot, qu’on ne présente plus. Robert, émérite soutien financier de l’Ump (dont on rappellera au passage que le trésorier se nommait, jusqu’à la fin du mois dernier, Eric Woerth), Robert, donc, dut à l’action de Woerth, Eric, alors ministre du budget, de se voir éviter un contrôle fiscal suite à une sombre affaire de vol concernant quelques lingots d’or (en partance pour la Suisse ?) Au passage et comme il se doit, le dénommé Peugeot, Eric, avait été, tout comme Godet, décoré de la légion d’honneur, des mains même de devinez qui ? C’est fou comme ces gens sont attirés par tout ce qui brille…
 
                                                                                       Frédo Ladrisse.
* photo D.Maunoury.


 

 

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