"Hommes/femmes politiques, journalistes au petit pied, philosophes du dimanche ou stars à la ramasse: tous sèment des perles de bêtise, sans se douter que, dans l'ombre, l'autruche les note, les commente, s'en gausse, et recrache le tout sur ce blog."

Avril 2014

Vers un changement de bocal ? Et mes plus sincères condiments

 
Tirant tête hors du trou, qu’entends-je ? Pierre Gattaz, le patron des patrons, medefien hérissé en diable dès qu’on vient lui causer du pacte dit de « responsabilité ». « Arrêtons de dire qu’en France on fait des cadeaux aux patrons, ça me hérisse le poil ! »,  a lâché le matou. Pov’ chat, il est vrai que 30 milliards d’allègement de charges ne saurait, par le patronat français, être considéré comme un cadeau dans la mesure où son exigence flirtait avec les cent milliards. Par ailleurs, citoyen contribuable salarié travailleur (qui ainsi subira quadruplement le coût de l’insane mesure), on te prie en les salons de ne pas oublier l’énormité des concessions concédées par le patronat en échange de cette pluie de biffetons : désormais les chefs d’entreprises seront mollement invités à faire ce qu’ils peuvent pour créer quelques emplois, si la conjoncture le permet, si le marché s’y prête et si il ne pleut pas. On comprend que cette contrepartie puisse être jugée par le Medef extrêmement contraignante. Pour les caciques du CAC40, y’a pas à tortiller : c’est le retour du goulag, sous la houlette d’un Hollande pur produit du stalinisme.
     Que la « main invisible du marché » finisse par serrer le cou de cette bande de voleurs patentés !
     Malgré les sales coups fomentés par ces ultragauchistes que sont Montebourg, Michel Sapin, François Bayrou Alain Juppé (autant de fanatiques utopistes prétendant « réguler le marché »), le capitalisme démocratique (selon la formule de Eric Hazan) avance, de par le monde, et partout se présente comme l’horizon indépassable d’une Histoire qu’on dit achevée, quand bien même ce capitalisme contient en lui et comme en germe la disparition, l’extinction, définitive, de l’humanité. Un peu de factuel ? Allons-y.
     Il y a quelques jours, un accord signé en l’Ukraine et la Communauté européenne stipulait que le nouveau régime ukrainien « s’engage à respecter les droits de l’homme ET l’économie de marché. » Les majuscules sont de moi, la mise sur le même plan des deux domaines est du ressort des signataires. Que le libéralisme ait l’outrance d’inscrire désormais son idéologie dans le marbre des accords internationaux, qu’ainsi il conditionne tout aide financière (dont l’Ukraine, entre autres pays, a cruellement besoin) à cette façon d’allégeance aux lois intangibles du marché ; que de cette façon il décrète irrecevable et se plaçant hors la loi toute expression démocratique visant à s’émanciper de ses entraves, n’est jamais qu’une nouvelle étape dans la guerre en question. Prise entre le marteau de la menace russe et l’enclume d’un endettement frisant la banqueroute, la pauvre Ukraine n’est jamais que la victime idéale, n’a d’autres choix que celle d’un servage consenti face à la puissance financière d’une Europe dont elle attendait, à coups sûrs, autre chose. Plutôt que la démocratie et la protection vis-à-vis de l’ogre russe, le premier accord Europe-Ukraine aura eu pour objet le menottage de son économie, désormais fatalement, exclusivement libérale. Les Ukrainiens ne l’oublieront pas, et nous ne l’oublierons pas non plus.
     Autre exemple, pour la route ? Elles furent bloquées, les routes, les avenues, les rues, lors de la venue de celui qu’on nomme vulgairement « le numéro 1 chinois », autrement appelé Xi Jinping, autrement appelé par ses potes du parti « Président de la République Populaire de Chine, Secrétaire Général du Parti Communiste Chinois et Président de la Commission Militaire Centrale du Parti Communiste Chinois ». Comme ça fait un peu long sur une carte de visite, même imprimée en Chine, on l’appellera Xi.
     Xi s’est donc baladé su les Champs Elysées, pavoisés de drapeaux chinois : un honneur auquel même le colonel Kadhafi, pourtant copain comme gorets avec Sarkoléon-le-petit, n’avait pas eu droit lors de sa parisienne visite. Les étendards de la pire des dictatures encore en exercice furent donc déployés, sans vergogne, les tapis nécessairement rouges étalés au seuil des palais de notre bananière république. L’enjeu était de taille : « dix-huit milliards d’euros de contrats, c’est de l’emploi » a résumé Hollande entre deux nems aux crevettes. Ce qu’il s’est gardé de préciser c’est que c’est de l’emploi surtout en Chine, et c’est du fric en France, pour filer aux patrons dans le cadre des « pactes » (voir plus haut). On a donc baissé son froc, on s’est laissé sucer l’anus par des dignitaires chinois venus constater sur place notre mollesse, notre lâcheté en matière de « droits de l’homme », dès lors qu’on agite un chéquier devant nos museaux. Indécis, timorés, faciles à acheter : tels sont les Européens aux yeux de Xi comme de Poutine, dont le récent anschluss sur la Crimée n’a suscité que mièvres réprobations de la part de l’Europe, première puissance mondiale, ah ah, laissez-moi rire avant de pleurer.
     Des avenues, des quartiers entiers de Paris furent bloqués durant la visite de Xi, par crainte qu’il ne soit confronté au moindre drapeau tibétain. 16 stations de métro furent fermées une après-midi, provoquant l’incompréhension du voyageur parisien : « il prend le métro, Xi ? Alors pourquoi on nous fait chier ?» Ledit Xi s’est fini au château de Versailles, concert privé, fastes sans furious, jusqu’à la dernière seconde Hollande et ses ministres jouèrent les escort girls pour Xi le dictateur. Mais on a vendu des Airbus. Lors de sa venue à Paris, Hitler n’en avait il est vrai commandé aucun.
      Droits de l’homme ET lois du marché : les unes primant sur les autres au titre d’une realpolitik n’ayant de réelle que le nom (si la réalité primait la survie d’une humanité condamnée par le capitalisme commanderait d’entamer, contre lui, sans tarder, une lutte au couteau), on ne sera pas étonné de voir les droits de l’homme reculer partout où le marché avance. Mais une telle réflexion, même frappée au coin du bon sens, risque de « hérisser le poil» du matou du Medef, donc chut.
     Tiens, au moment de conclure, je m’aperçois que j’ai oublié de parler des dernières élections. Curieux… C’est peut-être qu’à force de voir qu’on garde le même bocal et qu’on change juste de cornichons, j’ai perdu le goût des condiments ?


                                                                                                  Fredo Ladrisse.     

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